Léo ferré chante "les étrangers" pour le grand échiquier accompagné par le violoniste Ivry Gitlis. Homme libre, toujours tu chériras la mer...
En août 1972, Léo retrouve sa bande de copains, Maurice Frot, Paul Costanier et René Lochu. Ce dernier est un militant libertaire et engagé, qui aura une certain influence sur le poète.
Léo Ferré n'était pas venu seul à la rencontre de ses amis. Il était accompagné d'un chien qu'il avait recueilli, non pas sur le bord de la route mais en plein milieu de la voie, l'animal restant planté là, avec toute l'inconscience et la négligence de celui qui se suicide. Léo aimait les animaux...
Le marin est aussi mis à l'honneur. Il est en quelque sorte celui qui vous sauve lorsque vous échouez, quelque part à un moment de votre vie, dans un lieu que vous ne connaissez pas ou dans un état dans lequel vous ne vous reconnaissez plus. Vous devenez un étranger, pour les autres et le pire de tout, pour vous-même. Léo Ferré n'en est peut-être pas très loin à ce moment-là, lorsqu'il traîne ses guêtres en Bretagne, pour tenter certainement d'oublier sa rupture avec Madeleine...
Les étrangers
Les bateaux comme les filles ça fait bien du chiqué
Mais quand on s'fout à l'eau faut savoir naviguer
Regarde-la ta voile elle a les seins gonflés
La marée de tantôt te l'a déshabillée
Les bateaux comme les filles ça fait bien des chichis
Mais ce genre de bateau ça drague pas dans Paris
T'as les yeux de la mer et la gueule d'un bateau
Les marins c'est marrant même à terre c'est dans l'eau
Ta maman a piqué sur ta tête de vieux chien
Deux brillants que tu mets quand t'embarques ton destin
C'est pas comme en avril en avril soixante-huit
Lochu tu t'en souviens la mer on s'en foutait
On était trois copains avec une tragédie
Et puis ce chien perdu tout prêt à s'suicider
Quand la mer se ramène avec des étrangers
Homme ou chien c'est pareil on les r'garde naviguer
Et dans les rues d'Lorient ou d'Brest pour les sauver
Y a toujours un marin qui rallume son voilier
Regarde-la ta quille à la mer en allée
La marée de tantôt te l'a tout enjupée
Les bateaux comme les filles ça fait bien du chiqué
Mais quand on s'fout à l'eau faut savoir naviguer
T'as le coeur comme ces rocs vêtus de Chantilly
Quand la tempête y a fait un shampooing dans la nuit
Ta maman t'a croché deux ancres aux doigts de chair
Et les lignes de ta main ça s'lit au fond d'la mer
C'est pas comme en avril en avril soixante-huit
Lochu tu t'en souviens dans ces rues de l'emmerde
On était trois copains au bout de mille nuits
Et le jour qui s'pointait afin que rien ne s'perde
Quand la mer se ramène avec des étrangers
En Bretagne y a toujours la crêperie d'à côté
Et un marin qui t'file une bonne crêpe en ciment
Tellement il y a fourré des tonnes de sentiments
Regarde-la ta barre comme de la Pop musique
Ça fait un vrai bordel chez les maquereaux très chics
La mer a ses anglais avec le drapeau noir
On dirait Soixante-huit qui s'en r'vient du trottoir
Ma maman m'a cousu une gueule de chimpanzé
Si t'as la gueule d'un bar j'm'appelle Pépée Ferré
C'est pas comme en avril en avril de mon cul
Dans ce bar endossé au destin de la rue
Et c'est pas comme demain en l'An de l'An Dix mille
Lochu tu t'en souviens c'était beau dans c'temps-là
La mer dans les Soleils avec ou bien sans quille
Un bateau dans les dents des étoiles dans la voix
Et quand on se ram'nait avec nos Galaxies
Ça faisait un silence à vous mourir d'envie
Et les soirs d'illusion avec la nuit qui va
Dans Brest ou dans Lorient on pleure et on s'en va
L'An Dix mille... Lochu ? Tu t'rappelles ?
L'An Dix mille... Tu t'rappelles ? Lochu ?
L'An Dix mille, l'An Dix mille, l'An Dix mille...
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