dimanche 4 février 2024

« Nuit et brouillard » par Jean Ferrat

 


                

« Nuit et brouillard » par Jean Ferrat http://www.agoravox.fr/culture-loisir... « Merci Jean ! Merci pour la France ! » " Nous avons tous connu Jean Ferrat, et nous l'avons aimé. Voici un an, il nous quittait. Pour lui rendre un grand hommage, de très nombreuses personnalités s'étaient rendues au coeur des montagnes de l'Ardèche à Antraigues-sur-Volane où il s'était retiré depuis 30 ans..." ( La suite sur AgoraVox ). http://fr.wikipedia.org/wiki/Nuit_et_...) " C'est une chanson en mémoire des victimes des camps de concentration nazis de la Seconde Guerre mondiale, et en particulier en mémoire de son père, Juif émigré de Russie mort à Auschwitz1. Le titre fait référence à la directive Nuit et brouillard signée en 1941 par Adolf Hitler, qui stipule que les personnes représentant une menace pour le Reich ou l'armée allemande dans les territoires occupés seront condamnées à mort ou déportées. "

« Nuit et brouillard »

Ils étaient vingt et cent, ils étaient des milliers
Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiraient la nuit de leurs ongles battants
Ils étaient des milliers, ils étaient vingt et cent

Ils se croyaient des hommes, n’étaient plus que des nombres
Depuis longtemps leurs dés avaient été jetés
Dès que la main retombe il ne reste qu’une ombre
Ils ne devaient jamais plus revoir un été

La fuite monotone et sans hâte du temps
Survivre encore un jour, une heure, obstinément
Combien de tours de roues, d’arrêts et de départs
Qui n’en finissent pas de distiller l’espoir

Ils s’appelaient Jean-Pierre, Natacha ou Samuel
Certains priaient Jésus, Jéhovah ou Vichnou
D’autres ne priaient pas, mais qu’importe le ciel
Ils voulaient simplement ne plus vivre à genoux

Ils n’arrivaient pas tous à la fin du voyage
Ceux qui sont revenus peuvent-ils être heureux
Ils essaient d’oublier, étonnés qu’à leur âge
Les veines de leurs bras soient devenues si bleues

Les Allemands guettaient du haut des miradors
La lune se taisait comme vous vous taisiez
En regardant au loin, en regardant dehors
Votre chair était tendre à leurs chiens policiers

On me dit à présent que ces mots n’ont plus cours
Qu’il vaut mieux ne chanter que des chansons d’amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l’histoire
Et qu’il ne sert à rien de prendre une guitare

Mais qui donc est de taille à pouvoir m’arrêter?
L’ombre s’est faite humaine, aujourd’hui c’est l’été
Je twisterais les mots s’il fallait les twister
Pour qu’un jour les enfants sachent qui vous étiez

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