Le Web Journal de Maurice Victor Vial: Léo Ferre-La nuit

LA NUIT

"C'est ma frangine en noir Celle que j'appelle Bonsoir C'est un gars qu'à son bien Dans le bistrot du coin La nuit C'est le bourgeois qui se profile Sous l'oeil des filles de ville Qui croit que c'est arrivé Et qui paie pour monter La nuit C'est cette dame qui s'en va Donner sa langue au chat Et mêle à ses dentelles La tendresse des gamelles La nuit C'est un amour qui meurt Aussitôt qu'il se fait C'est mille ans de bonheur Dans un baiser vite fait C'est cette môme qu'a perdu La seule fleur qu'elle avait Et qu'attends dans la rue Des fois qu'on la retrouverait La nuit...La nuit... C'est le soleil du soir Qui enfile son peignoir Dans son arrière boutique Sous des becs électriques La nuit C'est le voleur qui va faire Des heures supplémentaires Et qu'est pas tatillon Sur les allocations La nuit C'est cet homme qui s'en va Sa rolls au bout des bras Et mêle à ses ficelles Le trésor des poubelles La nuit C'est des chevaux qu'on amène Au derby des côtelettes Des moutons qui se promènent Du côté de la Villette C'est un soldat traqué A sa dernière ronde Et qui compte les années Comme on compte les secondes La nuit... La nuit C'est une copine qui vend ce que d'habitude on prend Et qui pour cent sous de plus Se met sens dessus dessous La nuit C'est un chouette courant d'air Pour les amours pas chers Un petit hôtel furtif Pour les mini tarifs La nuit C'est le mec qui transite Sauf de l'eau bénite Et mêle à ses hoquets Le parfum du beaujolais La nuit C'est un homme qui se promène La nuit en plein midi Et sa canne qui l'entraîne Dans les autos de Paris C'est cet homme qu'à pas vu La pitié qui passait Et qu'attend dans la rue Des fois... qu'on lui inventerait Le jour.... Le jour"