lundi 15 août 2016

LA BELLE CHANSON - Les amants tristes . Léo Ferré

LA BELLE CHANSON


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bellaquiquetta 

          Les amants tristes . Léo Ferré .



                        

Paroles de Les Amants TristesComme une fleur venue d'on ne sait où petit Fané déjà pour moi pour toi dans les vitrines
 Dans un texte impossible à se carrer au lit 
Ces fleurs du mal dit-on que tes courbes dessinent
 On dit dans ton quartier que tu as froid aux yeux
 Que t'y mets des fichus de bandes dessinées 
Et que les gens te lisent un peu comme tu veux 
Tu leur fais avaler tes monts et tes vallées 
Tu es aux carrefours avec le rouge mis On y attend du vert de tes vertes prairies 
Alors que j'ai fauché ce matin dans ton lit
 De quoi nourrir l'hiver et ma mélancolie
 Mélancolie mélancolie la mer revient Je t'attends sur le quai avec tes bateaux blêmes 
Tes poissons d'argent bleu tes paniers ton destin
 Et mes mouettes dans tes cris comme une traîne
 Je connais une femme lubrique à Paris
 Qui mange mes syllabes et me les rend indemnes 
Avec de la musique autour qui me sourit
 Demain je lui dirai des hiboux qui s'envolent
 J'en connais dans ma nuit qui n'ont pas de fourrure
 Qui crèvent doucement de froid dans l'antarctique
 De cette négation d'aimer au bout de l'ombre
 Mes oiseaux font de l'ombre en plein minuit néon
 Sous les verts plébiscites 
Tu connais une femme lubrique à Moscou 
Qui mange tes syllabes et les met dans ton bortsch
 Il connaît une femme lubrique à Pékin
 Qui mange sa muraille et la donne au Parti
 Demain nous leur dirons des hiboux qui s'envolent 
J'en connais dans leur nuit qui n'ont plus de jaquette
 Qui crèvent doucement de froid sous leur casquette
 Avec leurs beaux yeux d'or mêlés du Palomar là-bas 
Vers les voix de la nuit des étoiles perdues
 J'entends des sons lointains qui cherchent des caresses
 Et dans les faits divers là-bas ça s'exaspère 
Et ça tue le chagrin comme on tue la flicaille
 Au coin d'un vieux soleil exténué des glaces
 Mélancolie
 Mélancolie la mer se calme 
Je vois monter partout des filles et des palmes
 Avec des fruits huilés dans la fente alanguie
 Les matelots me font des signes de fortune
 Ils se noient dans le sang du soleil descendant 
Vers l'Ouest toujours à l'Ouest Western de carton-pâte
 Le dentifrice dans la nuit se tient au rose 
Un néon de misère emprunté à tes yeux
 Viens je t'emmènerai là-bas vers les grands astres 
Dans le désastre du matin ou chez Renault 
Voir comment l'on fabrique un chef et des autos
 Voir la pitié grandir sur des croix qui s'enchristent
 Je t'aimerai sur la chaussée et son collant
 Ton goudron j'y prendrai le suc de mes cavales 
J'aurai l'air d'un roi nègre tu mettras à la moelle
 Où je glouglouterai repu ton sentiment 
Ton sentiment a le goût de gazelle 
Ton ventre n'est qu'un champ de lavande à midi
 Et mon couteau qui crisse en y fauchant ma mie
 Est d'un faucheur distrait qui s'éploie sous ton aile 
Il est au féminin ton sentiment
 Il est comme ces demoiselles qui en ont à revendre 
Et qui le vendent bien Ton sentiment me fait gonfler mes voiles d'ange 
Ton sentiment me fait du bien au sentiment 
Et les fleurs du pavé poussent des cris étranges
 Moi qui viens du pavé vers toi et me dressant 
Et moi je ne te prends que ce que je te dois 
Si je n'avais que du sentiment à t'filer
 Il y a bien longtemps que tu m'aurais banni
 De ton fief de ton cul de ta loi de tes langes 
Il y a bien longtemps que tu te serais cassée
 Mais tu m'as réveillé
 Et tu nous as tirés de notre mort quotidienne
 Et puis toi tu te meurs dans la rue à midi 
Sous des floppées de soleils mous 
Et de ces mecs qui te prennent dans les mirettes
 Et qui te mirent bien dans l'os
 Des fois que leur labo pourrait leur renvoyer subito
 Ta dégaine grandeur naturliche 
A la mesure de leur page
 Des fois le soir ils te prendraient impunément
 Ils s'empaquetteraient de toi
 De ton devoir de grue
 Comme dans un journal 
Au fond t'es un journal 
Je te lis je te plie je te froisse et tu cries 
Quand on froisse la soie la forêt sa copine
 Lui fait des cris de s?ur lui fait des cris sublimes
 La soie du crépuscule a des cris de velours
 Dans des lits de parade 
Dans ces feuilles d'automne 
Des taches de rousseur sur la gueule des bois
 Je te lis je te plie je te froisse et tu cries 
Au fond t'es un journal 
Tu t'en prendrais plutôt pour cinq colonnes 
Chez toi le fait divers sonne comme un outrage 
Tu es partout chez toi et même aux mots croisés 
Tu m'y fais deviner les armes de ta voix Je t'aime et verticalement c'est bien
 Tu croises dans mes eaux quand je suis ton pirate Je te lis je te plie je te froisse et tu cries 
Quand je t'aurai bien lue y compris les annonces
 J'irai au marché aux poissons
 Et t'envelopperai de moules vertes 
Au fond t'es un journal mouillé
 Avec ta robe imprimée en blanc et noir
 Et tes paroles que personne ne pourra plus lire 
Tu seras ma dernière nouvelle effacée sur le sable
 Tu seras mienne pour la mort je t'aime
 Et même avec la fin du monde
 La fin du monde abstraite où tout n'est que chiffré 
Avec ces c?urs d'acier leurs battements trichés
 Avec ces poumons d'or dans les cages-ascenseurs
 Où l'on se tient debout où l'on se tient ailleurs
 Tu vas descendre là pour t'entendre rêver
 Même le rêve gueule à n'y pouvoir plus rien Le silence est rempli du silence trop plein
 Quand ça déborde on croit venue la fin des temps
 De ces temps mesurés sur des machines obscènes 
Où les minutes ont des cons qui se promènent
 En se prenant pour l'Éternité 
Et même avec la fin du monde Je me démerderai pour que t'y voies que dalle 
Que dalle c'est pas mal ça ne fait que passer 
Ce rien qui prend ses aises aux week-ends de la mort
 Quand les ballots y accélèrent leurs victimes
 Enchâssée enchristée encollée à mon froc 
Tu partiras là-bas vers des boutiques fantastiques
 Vers le supermarché où l'on vend la paresse 
Où l'on vend de la mort aussi quand on s'y laisse 
Où l'on vend la fumée et le vent en paquet
 Et l'on paie en sortant avec des sortilèges
 L'instant
 Au cent millième de seconde Je te regarderai 
Tu monteras du fond des âges
 Tu te prosterneras
 Je te tendrai la main 
Et tu m'agrippera L'instant
 Il va fondre sur toi comme la foudre 
Trois cent mille bornes à la seconde Il n'aura plus le temps de s'attarder au feu rouge
 On grillera les feux d'alarme 
Et ma pensée qui te devance
Regarde 
Ecoute bien le chant de cet enfant maudit 
Que tu croiras ton mec et qui n'est qu'un mirage 
Oublié par ma mère au fond d'une poubelle 
Cette éternelle nuit
 Bien se laver le cul c'est donc ça le désordre ! 
Regarde-moi là dans mes yeux regarde il vient l'instant
 Comme à l'automne les bandits jaunes 
Qui font aux arbres des hold-up mordorés 
Et tu vas t'envahir 
Et tu vas t'immerger
 Et te coloniser 
Tu es seule dans mes pattes 
Comme un saxo gueulant des chants désespérés 
Tes cris sont des violons des rues
 Des hautbois en plastique 
Des flûtes de laiton
 Et tu t'en fous 
C'est là il est là 
Entends la mer qui te remonte dans la gueule 
Et cette marée double au fond de tes yeux-feu
 Dans le feu de tes yeux mon regard s'est éteint 
Crie crie crie 
TU es moi 
JE c'est toi
 Comment t'appelles-tu ?
 Tu t'appelles la nuit dans le ventre des filles
 De ces filles qui roulent au bord de la mort lente
 Tu t'appelles l'amour
 Tu es toutes les femmes
 Tu es 
TOI tu es 
ELLES Des niagaras vernis me tombent dans la gueule
 Crie crie crie 
Tu n'es plus là parce que tu es moi
 Et que je suis ailleurs 
JE et TOI 
C'est tout comme 
Et l'on s'en va mourir au club des nuits cassées 
Qui donc réparera l'âme des amants tristes 
Qui donc réparera l'âme des amants tristes 
Qui donc réparera l'âme des amants tristes Qui donc ?


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