LA BELLE CHANSON
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Jean Ferrat - pauvre Boris
Pauvre Boris - Jean Ferrat
Depuis que tu nous as quittés
Les cons n’arrêtent pas de voler
Les autres de les regarder
Si l’autre jour on a bien ri
Il paraît que « le déserteur »
Est un des grands succès de l’heure
Quand c’est chanté par Anthony
Pauvre Boris
Voilà quinze ans qu’en Indochine
La France se déshonorait
Et l’on te traitait de vermine
De dire que tu n’irais jamais
Si tu les vois sur leurs guitares
Ajuster tes petits couplets
Avec quinze années de retard
Ce que tu dois en rigoler
Pauvre Boris
Ils vont chercher en Amérique
La mode qui fait des dollars
Un jour ils chantent des cantiques
Et l’autre des refrains à boire
Et quand ça marche avec Dylan
Chacun a son petit Vietnam
Chacun son nègre dont les os
Lui déchirent le cœur et la peau
Pauvre Boris
On va quitter ces pauvres mecs
Pour faire une java d’enfer
Manger la cervelle d’un évêque
Avec le foie d’un militaire
Faire sauter à la dynamite
La bourse avec le Panthéon
Pour voir si ça tuera les mythes
Qui nous dévorent tout du long
Pauvre Boris
Tu vois rien n’a vraiment changé
Depuis que tu nous as quittés
Jean Ferrat
Une chanson dont la musique et le texte ont été écrits par Jean Ferrat. Elle est sortie en 1966 dans l’album « Maria ». Ferrat s’adresse à Boris Vian, lui-même auteur de la fameuse chanson « Le déserteur », qui a beaucoup fait couler d’encre dans le contexte de son époque.
Pour comprendre ces paroles, il est utile de se plonger dans l’histoire de cette chanson.
Boris Vian (1920-1959) écrit « Le déserteur », texte anti-militariste en février 1954, à la fin de la guerre d’Indochine (1946 – 1954), mais juste avant la guerre d’Algérie (1954 -1962). En collaboration avec Harold B.Bercy, il le met en musique, puis il propose la chanson à bon nombre d’artistes, mais tous refusent de l’interpréter. En effet, la version d’origine comporte une fin très différente : au lieu de « si vous me poursuivez prévenez vos gendarmes que je n’aurai pas d’armes et qu’ils pourront tirer », il avait écrit « si vous me poursuivez prévenez vos gendarmes que je possède une arme et que je sais tirer ».
Le chanteur Mouloudji propose alors à Boris Vian d’apporter des modifications visant à rendre le texte politiquement plus correct, tout en restant dans une logique pacifiste. Il transforme donc la fin, mais également quelques phrases centrales, « Monsieur le Président » devient « Monsieur que l’on nomme grand », « Ma décision est prise je m’en vais déserter » devient « Les guerres sont des bêtises, le monde en a assez ». L’enregistrement a lieu en mai 1954, juste après la défaite française de Diên Biên Phu. Mais malgré toutes les édulcorations du texte original, la chanson fait un scandale retentissant dans le contexte historique et politique de l’époque. Elle fut censurée à la radio et le disque interdit de vente jusqu’en 1962. Autant dire que Boris Vian, décédé en 1959, n’aura vécu que les échecs et les remous liés à sa composition…
Voilà pourquoi Jean Ferrat fait un clin d’œil à Boris Vian : sa chanson, qui n’a connu aucun succès à l’époque de sa sortie, est brandie en étendard quinze ans plus tard. « Ce que tu dois bien rigoler pauvre Boris ».
Si vous désirez en savoir un peu plus sur l'histoire de la chanson "le déserteur", vous trouverez une page plus complète à la rubrique "chansons" de ce blog.
Vous pouvez écouter ces deux chansons d'un clic, sur votre site musical préféré.
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